lundi 16 novembre 2015

Allez les filles, au travail !

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Ce billet est un hommage. Un hommage à une jeune et belle italienne, Valeria Solesin, doctorante à l'INED (Institut National d'Études Démographiques) et décimée dans la fleur de l'âge par ces rats malades de la peste que sont les terroristes. La thèse qu'elle préparait appelait à la vie :
Ma thèse porte sur une comparaison de la fécondité, du désir d’enfant et de la conciliation entre vie familiale et activité professionnelle entre la France et l’Italie...
Elle était venue vivre à Paris, elle y a trouvé la mort (qui précède de quelques mois celle de Giulio Regeni, victime lui aussi du terrorisme, sous une autre forme : le terrorisme d'État...). Les mots de ses parents m'ont profondément touché : que le souvenir de Valeria puisse être propagé, c'est maintenant ce qui nous importe. Ou encore, souvenez-vous d'elle comme d'une personne merveilleuse.


Elle fut également volontaire pendant plusieurs années pour Emergency, et Gino Strada et sa fille l'ont saluée sur Twitter.

Mais par là-même, ce billet est également un hommage à tous ces gens, femmes et hommes, jeunes pour la plupart, qui ont péri dans les attentats du 13 novembre 2015. Et j'espère que celles et ceux qui les ont aimés et connus réussiront à propager et partager avec nous leur souvenir de personnes merveilleuses, à nous raconter quelque chose de leur vie brisée avant l'âge.

Un ami italien qui vit à Paris, à deux pas de la République, Giovanni Merloni, a écrit un très beau billet où il dit :
Maintenant, comme tous les Parisiens, je ne suis plus ce que j’étais hier. Je suis un être intimement blessé et meurtri. Ils me manquent, tous ces visages que je m’efforce d’imaginer...
Ainsi, en nous racontant quelque chose de chacun d'eux, de chacune d'elles, vous nous aiderez à mieux nous imaginer pour ne pas les oublier.

Ma contribution est prise d'un site italien, Neodemos, qui a republié aujourd'hui un article que Valeria leur avait soumis en 2013, intitulé « Allez les filles, au travail ! ». Et bien que le titre soit en français, l'article est en italien, et je n'ai pas trouvé trace de sa traduction sur le Web. J'ai donc décidé de le traduire pour le partager avec vous.

Quant au choix de titrer en français un article italien, je pense qu'il s'explique par un jeu de mots intraduisible en italien : travail en français désigne aussi bien l'emploi que le travail d'une femme qui accouche, alors que l'italien a deux mots différents : respectivement "lavoro" et "travaglio", qui sont les deux principaux sujets abordés par Valeria dans son article.

Donc même si je ne peux pas en être sûr à 100%, il est évident que la chose ne pouvait pas lui échapper, elle qui partageait ces deux cultures qui sont aussi les miennes, la culture française et la culture italienne. Voici ma traduction de l'original :
En Europe, dès la fin des années 90, la Stratégie européenne pour l’emploi (SEE) a promu l’emploi féminin. L’objectif des institutions communautaires visait à encourager l’emploi des femmes pendant toutes les étapes de leur vie active, et en particulier dans les moments considérés « à risque », qui coïncident avec la naissance des enfants. Bien que la participation des femmes au marché du travail ait fortement augmenté au sein de l’Union européenne, il persiste encore d’importantes différences entre les pays. En effet, les pays d’Europe du Nord se caractérisent par des taux d’emploi féminin élevés et par de hauts niveaux de fécondité. En revanche, dans les pays d’Europe du Sud, les taux d’activité des femmes sont bas et se conjuguent à de faibles niveaux de fécondité (OCDE, 2011). 
Nous observons d’ailleurs ces mêmes écarts entre la France et l’Italie. En 2011, le taux d’emploi des femmes âgées entre 20 et 64 ans était de 65 % en France, contre 50 % en Italie. Toujours en 2011, l’indicateur conjoncturel de fécondité était de 2 enfants par femme en France, contre tout juste 1,4 en Italie (ISTAT, 2012). 
Or il s’agit de deux pays relativement proches en termes démographiques, tous deux ayant une population d’environ 60 millions d’habitants (en ne considérant que la France métropolitaine), et une espérance de vie à la naissance comparable. Ils partagent en outre divers aspects culturels, tels que la religion catholique, et géographiques, puisqu’ils sont réunis par 515 km de frontière en commun. De même, l’organisation du marché du travail semble répondre à une logique semblable : relativement stricte dans les deux pays, même si en Italie les travailleurs appartenant aux catégories « habituelles » comme l’industrie, sont davantage protégés. 
À la lumière de ces données, il paraît logique de se demander comment ces deux pays voisins présentent des écarts aussi profonds au niveau de la fécondité et de la participation des femmes au marché du travail. Parmi les explications possibles, observons que l’Italie, plus que la France, conserve une vision plus traditionnelle des rôles assignés aux hommes et aux femmes. 
Du travail, mais pour qui ? Opinions des italiens et des français 
En 2008, l’étude « European Value Study » décrit les grands contrastes qui caractérisent les opinions des français et des italiens sur la participation des femmes au marché du travail. 
À la question « Un enfant qui n’a pas encore l’âge d’aller à l’école a des chances de souffrir si sa mère travaille ? », 76 % des italiennes et des italiens se déclarent « tout à fait d’accord » ou « plutôt d’accord », contre seulement 41 % des françaises et des français. De même, à la question « Une mère qui travaille peut avoir avec ses enfants des relations aussi chaleureuses et sécurisantes qu’une mère qui ne travaille pas ? », là encore les italiennes et les italiens se montrent plus traditionnels que leurs voisins transalpins, puisque 19 % d’entre eux sont « tout à fait d’accord », contre 61 % de françaises et de français. 
Il y a donc en Italie une opinion négative à l’égard du travail féminin lorsque les enfants sont en âge pré-scolaire, alors qu’en revanche, en France, l’emploi des femmes est encouragé à toutes les étapes, y compris en présence d’enfants en bas âge. Pour autant, il nous semble raisonnable de penser qu’en Italie, plus qu’en France, la participation des femmes au marché du travail peut être influencée par l’âge des enfants et par leur nombre. 
Qui sont les femmes qui travaillent en France et en Italie ? 
Selon les données de l’enquête 2011 sur la population active (Labour Force Survey), dans les deux pays le taux d’emploi des femmes sans enfant est systématiquement plus élevé que celui des femmes qui en ont. Toutefois, la situation semble bien plus grave en Italie puisque, dans la tranche d’âge comprise entre 25 et 49 ans, 76 % des femmes sans enfant travaillent, contre 55% des femmes ayant des enfants, alors qu’en France, ces mêmes pourcentages atteignent respectivement 81 % et 74 %. 
De plus, en Italie, le taux d’emploi des femmes est influencé par la taille de la famille, en diminuant au fur et à mesure qu’augmente le nombre d’enfants. Or en France, les variations de ce taux restent marginales même en présence d’un ou deux enfants dans le noyau familial. Cependant, dans les deux pays, l’activité professionnelle des femmes est sérieusement compromise dans les familles avec trois enfants ou plus. En Italie, en effet, dans la tranche d’âge 25-49 ans, seules 42 % des femmes ayant trois enfants sont actives avec un emploi, là où ce pourcentage touche 60 % en France. 
Donc, bien qu’en Italie il y ait une opinion négative sur le travail des femmes en présence de jeunes enfants, le taux d’emploi des femmes ayant des enfants en âge pré-scolaire n’est inférieur que de 6 points à celui des femmes sans enfants âgés de moins de six ans (61 % contre 55 %). En France, au contraire, même si l’on a une opinion positive sur le travail des femmes pendant toutes les phases de leur vie active, le taux d’emploi diminue fortement en présence de jeunes enfants (80 % des femmes sans enfants âgés de moins de six ans sont actives avec un emploi, contre 66 % des mères ayant des enfants de moins de six ans). Il existe en effet dans ce pays une batterie de mesures pour concilier travail et vie de famille, afin de permettre aux femmes (et aux hommes) d’interrompre - momentanément - leurs activités professionnelles.
Conclusion 
Dans un environnement européen qui favorise l’emploi des femmes, impossible d’ignorer l’impact de la naissance des enfants sur leur vie professionnelle. D’un côté, en effet, si l’Italie peine à atteindre l’objectif fixé par le traité de Lisbonne de parvenir à un taux d’emploi féminin de 60 %, observons de l’autre qu’en France, un pays bien plus « performant », l’emploi des femmes reste encore sensiblement affecté par l’âge et le nombre des enfants dans le noyau familial. C’est pour cette raison qu’il semble souhaitable de parvenir dans les deux pays à un meilleur partage des responsabilités familiales et professionnelles entre les femmes et les hommes.
Voilà. Je n'ai rien à ajouter, sinon l'immense tristesse qui m'étreint face à tant de gâchis.