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Dans le cadre des "rencontres sur les rives de la traduction" (Encounters at the Shores of Translation) organisées via la plateforme Zoom par Hammouda Salhi (Director of the Master’s Program in Translation and Interpreting - University of Tunis El Manar), dont le thème au sens large portait sur les langues, la culture et la traduction, je suis intervenu sur le sujet suivant :
La chose se présentait davantage comme une discussion libre et informelle, avec une brève entrée en matière d'un quart d'heure suivie d'une séance de questions-réponses d'une heure.
Pour introduire mon argument, je me suis basé sur une seule diapositive (qui faisait déjà partie de la présentation donnée lors de TINVOM), dont les bouleversements que connaît actuellement notre métier imposaient une mise à jour :
Thank you so much Mr. @jmleray for the presentation. It was very interesting and fruitful. Merci. pic.twitter.com/n3zpbbAV4D— Safia AIT (@altsafia) May 29, 2020
Diapo déjà incluse dans un billet intitulé Le marché mondial de la traduction et les 5 forces de Porter, écrit en février 2013 et intégré au triptyque « Moi et les autres » comprenant deux billets supplémentaires :
- Se (faire) connaître comme traducteur
- Identifier mon propre marché de la traduction pour me positionner par rapport à la concurrence
Depuis le début du millénaire et les avancées notables de Google dans ce domaine, le sujet "traduction automatique" revient régulièrement sur le tapis chez les professionnels, et notamment la crainte diffuse que les traducteurs humains soient un jour remplacés par des machines à traduire.
Certes, nous n'en sommes pas encore là (et selon moi nous n'en serons jamais là), mais il est clair que notre métier subit des changements profonds (et que certains signaux ne sont pas rassurants). Si l'on met de côté certaines niches très spécialisées, grosso modo nous observons le principal impact de cette montée en puissance de la traduction automatique sur les prix.
Ce n'est pas nouveau : depuis l'avènement de la TAO (c'est-à-dire la traduction assistée par ordinateur, qui se basait essentiellement sur l'utilisation de mémoires constituées à partir de données bilingues extraites de traductions précédentes, avec une série de segments cibles en regard de segments sources) les tarifs de la traduction diminuent sans arrêt.
Une baisse constante des tarifs censée être compensée par une augmentation incessante de la productivité. Donc, en clair, vos tarifs baissent (autour de 30% selon moi, ce qui n'est pas rien), mais votre productivité augmente : auparavant, la moyenne admise était de 2500 mots/jour pour un traducteur, aujourd'hui nous sommes plus proches de 4000 en MTPE, soit 60% de plus !
Ainsi, on vous dira que si vous perdez 30% d'un côté, vous en gagnez 60% de l'autre, soit un gain net de 30%...
Ça c'est la théorie. Dans la pratique, c'est loin d'être toujours le cas. Et, en outre, la MTPE modifie aussi la nature du travail du traducteur, qui ne traduit plus lui-même mais intervient en aval sur la qualité - plus ou moins bonne - d'un texte fourni par un moteur de traduction automatique.
Dans cette optique, je dirais que la qualification du traducteur passe de celle d'artisan à celle d'exécutant : or nous savons que le simple exécutant ne jouit pas de la même liberté que l'artisan...
Il n'empêche : dans la réalité, tous les grands groupes de traduction - qui sont en train de phagocyter le marché des services linguistiques dans son ensemble, avec une concentration permanente d'acteurs de plus en plus puissants à coup de fusions ou d'opérations de croissance externe - déploient chacun un moteur propriétaire de traduction automatique, et confient aux traducteurs de moins en moins de traductions à proprement parler (où le traducteur est l'artisan de son propre travail), et de plus en plus de "missions en MTPE" à des exécutants n'ayant pas grande latitude pour intervenir...
Telle est la réalité à l'origine de mon idée d'actualiser ce modèle des 5 forces de Porter adapté aux traducteurs, en réévaluant la catégorie IV - Produits de substitution pour la pondérer en lui réassignant ce poids grandissant de la traduction automatique dans le mix...
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Je vous présente donc une synthèse (uniquement l'essentiel, pour ne pas répéter plusieurs choses dont j'ai déjà parlé dans différents billets) de l'échange informel que nous avons eu avec les étudiants du Master professionnel en traduction/interprétation de l'Université El Manar de Tunis, en commençant par ma brève présentation et en terminant par la séance de 8 questions-réponses qui a suivi.
Présentation
J'ai présenté la diapo en illustrant le modèle « concurrentiel » des 5 forces en tension constante au centre duquel se trouve chacun.e d'entre nous. Un rapport de forces permanent entre les différents intervenants : agences de traduction, clients, collègues-concurrents et produits de substitution (ce que la peur des traducteurs d'être remplacés à terme par des machines exprime clairement).
Des tensions qui ne s'exercent donc pas uniquement sur les tarifs, mais également sur les relations entre toutes les parties prenantes, sur les conditions de travail, sur les exigences de productivité et de qualité en dépit des délais moindres, etc.
Des tensions visant de plus en plus à réaliser la fameuse quadrature du triangle :
Car l'idée dissimulée derrière l'usage quasi systématique de la traduction automatique est qu'elle permettra désormais d'avoir les trois à la fois : faster, better, cheaper, pick three!
Voilà pourquoi chaque grand groupe de traduction, chaque fournisseur de services linguistiques, déploie désormais son système propriétaire de TA, avec un moteur de traduction formé sur la base des corpus qu'il possède, d'où la nécessité de corpus bilingues toujours plus importants et spécialisés, vu les différences qualitatives des textes traduits automatiquement en fonction des couples de langue et des secteurs, avec un curseur extrêmement variable sur une échelle de 1 à 10...
En effet, le postulat de départ est que le résultat qualitatif final dépendra étroitement de la qualité initiale du texte fourni à l'exécutant, qui devra forcément faire un compromis entre fignoler et produire. Or vu les tarifs associés à la MTPE, la décision sera vite prise...
Je pense toutefois que les clients ont pris en compte ce paramètre et que désormais leur choix prioritaire est le binôme faster & cheaper. Tout est une question de dosage.
Personnellement, j'appelle la traduction automatique l'industrialisation du good enough. Et elle est irréversible.
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Question 1 : en tant que traducteur/interprète débutant, quels sont mes avantages compétitifs ?
Le préambule pour répondre à cette question est de se connaître en tant que traducteur/interprète et de connaître son propre marché :
1 traducteur, 1 traductrice, 1 interprète = 1 marché !
Me connaître :
- Quels sont mes points forts ?
- Mes centres d'intérêts ?
- Ces points forts et ces centres d'intérêts correspondent-ils aux exigences du marché ?
- Quels sont mes points faibles ? (Ce n'est qu'en les connaissant que je peux les renforcer)
- Quelle est ma valeur en tant que traducteur/interprète ? (Savoir m'évaluer et me former en conséquence, notamment aux logiciels de traduction, à la terminologie, etc., une formation qui dure tout au long de la vie)
Connaître mon marché :
- Quelle est ma connaissance du marché de la traduction/interprétation en général, et de mon marché en particulier ? (grâce à une étude de marché et des recherches précises sur mes secteurs de spécialisation)
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Question 2, ainsi répartie :
- Pour un parcours diversifié, quelle est la charge de travail pour parvenir à un équilibre entre toutes les casquettes ?
- Comment réussir à me démarquer sur le secteur de la traduction/interprétation ?
- Quelles sont les erreurs qui pourraient mettre fin à ma carrière ?
- Y a-t-il un avantage à travailler en interne pour une agence / un fournisseur de services linguistiques ?
1. La diversification peut obéir à deux types d'exigence : financière et intellectuelle.
- La nécessité financière est évidente. Si je ne gagne pas assez bien ma vie uniquement avec la traduction ou l'interprétation, je dois ajouter des cordes à mon arc : doublage, transcription, gestion de projets, localisation de sites web, etc. En bref, être multiservices pour mieux faire bouillir la marmite !
- L'exigence intellectuelle ressort de la curiosité, du désir de se fixer de nouveaux défis pour mieux se motiver, pour sortir de sa zone de confort comme disent les anglo-saxons, de s'adapter aux conditions changeantes du marché, etc.
Lorsque l'on débute, il faut oser se lancer dans l'inconnu, certes, mais aussi savoir se projeter dans la durée, réfléchir sur son métier, revenir parfois en arrière pour mieux repartir, etc.
Selon moi, entre l'exigence financière et l'exigence intellectuelle, c'est cette dernière qui est la plus importante.
3. J'ai identifié 3 types d'erreur (il y en a sûrement d'autres, mais c'est ce que j'ai répondu dans l'instant) qu'un traducteur/interprète ne doit absolument pas commettre sous peine de mettre sa carrière en danger :
- ne pas fournir la qualité / avoir la présomption de pouvoir tout faire (non seulement ce n'est pas professionnel, mais c'est extrêmement nuisible en termes d'image, de réputation, et c'est le meilleur moyen de perdre les clients les uns après les autres, alors qu'ils sont si difficiles à conquérir)
- ne pas savoir s'entourer (constituer un réseau fiable signifie trouver les bons partenaires [agences, clients ou collègues-concurrents] et créer une relation de confiance avec ses interlocuteurs : le traducteur n'est pas seul, c'est un animal social)
- être incapable de s'évaluer soi-même et d'évaluer son propre travail (la base du métier se fonde sur le devis, à savoir la capacité à évaluer, souvent dans l'heure qui vient, le triptyque quantité / difficulté / temps de réalisation pour négocier le prix de chaque mission : si l'évaluation est juste, on retombe sur ses pieds ; si elle est erronée, le risque concret est de travailler à perte car il est pratiquement impossible - et anticommercial - de modifier un prix convenu au départ au moment de livrer le travail !)
2. Contrairement à ce que l'on croit, on ne se démarque pas par la qualité. Pour un client, la qualité est un acquis. Aucun client ne vous contactera jamais s'il n'est pas convaincu que vous allez lui fournir la qualité qu'il attend.
La qualité n'est donc plus un discriminant pour vous choisir parmi vos concurrents, puisque tous les professionnels sont censés la fournir.
Donc une première étape pour apprendre à se démarquer peut passer par la rédaction d'un business plan, et quoi qu'il en soit par la mise en place d'une stratégie de branding-marketing afin d'organiser sa présence et sa visibilité sur le Web.
4. C'est un avantage certain en ce que ça permet de gagner en expérience et cela contribue fortement à l'apprentissage du métier. Cependant, pour se faire recruter, il faut être capable de transmettre à l'agence / au fournisseur de services linguistiques une image fidèle de soi, de ses compétences, de son engagement, de son sérieux, de son envie d'apprendre et de progresser, etc.
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Question 3 : en qualité de traducteur, est-ce que je dois facturer plus pour ma contribution à la création d'une mémoire de traduction ?
En préambule, disons que la propriété des mémoires est une question débattue depuis des années sans jamais avoir été véritablement tranchée : en France, la mémoire appartient au client, en Italie certains contrats rédigés par une association de traducteurs en attribuent la propriété au traducteur, etc.
Or la réponse à cette question devient sans objet avec le déploiement de la TA au sein des agences / groupes fournisseurs de services linguistiques, puisque cela rebat complètement les cartes. Je ne suis même pas certain que le client final soit toujours informé que sa traduction est réalisée en MTPE...
Par contre, il est indubitable que l'utilisation de la post-édition de TA a pour but de faire baisser les prix payés aux traducteurs-exécutants (selon moi d'au moins 30% par rapport aux tarifs habituels des traductions). Pour autant, il est probable qu'un traducteur annonçant aux agences qu'il souhaiterait facturer plus au motif qu'il contribue à alimenter/améliorer leurs mémoires se verrait opposer par celles-ci une fin de non-recevoir. Quitte à faire appel à ses collègues-concurrents...
[Mise à jour] Après avoir lancé une discussion sur Proz, une collègue, Lorraine Dubuc, me répond sur ce point (c'est moi qui souligne en caractères gras) :
En plus de passer des heures non rémunérées à apprendre sans arrêt de nouveaux logiciels et fonctionnements de plateformes en ligne, nous voilà réduits à déplacer des balises, éliminer des espaces et finalement faire de l'esthétisme au lieu de traduire. Mais le pire c'est qu'en traduisant sur des portails, nous n'avons même plus accès à nos propres mémoires de traduction. C'est le portail qui se les approprie. Les recherches terminologiques du traducteur se font donc avaler, si je puis dire, par la plateforme du fournisseur de travail.J'avais effectivement oublié de parler de cette "confiscation" de notre travail par la plateforme. Oubli réparé... [/Mise à jour]
(...)
Il est très important de donner l'heure juste aux jeunes qui s'orientent en traduction... Nous leur devons la vérité.
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Question 4 : les traducteurs ne scient-ils pas la branche sur laquelle ils sont assis en nourrissant les technologies de TA ?
Si l'on met à part la machine à écrire, le traitement de texte, la TAO, les mémoires et la recherche contextuelle, qui ont contribué à faciliter toujours plus le travail du traducteur, depuis Federico Pucci le parcours de la traduction automatique a constamment progressé : de la TA à base règles à Google (premier acteur à disposer de suffisamment de données linguistiques pour appliquer la statistique à la TA, d'où l'apparition des premiers systèmes hybrides plus performants), nous rentrons aujourd'hui dans l'ère de la traduction neuronale et de l'intelligence artificielle.
Donc avec les puissances de calcul phénoménales que l'internaute lambda n'arrive pas même à concevoir, il est certain que la qualité, qui n'a cessé de s'améliorer au cours des vingt dernières années, progressera encore, voire de façon spectaculaire.
En tant que traducteurs travaillant avec des agences / des groupes qui nous confient des missions de MTPE, nous contribuons à nourrir des systèmes propriétaires de portée limitée, qui restent au niveau de chaque groupe (quand bien même il peut s'agir d'un groupe important).
En revanche, l'envergure de Google est planétaire...
Par ailleurs, les clients évoluent aussi et ne sont plus disponibles à payer comme avant, mais exigent toujours plus de productivité à des coûts moindres.
La confluence de tous ces éléments rend donc bien aléatoire notre "force contractuelle" face à ce tsunami mondial qui a été enclenché et ne s'arrêtera plus.
La seule valeur ajoutée restant aux mains du traducteur humain est la finition : la TA fournit un texte prêt à environ 75, 80 ou 90%, c'est selon, mais ce sont les derniers 25, 20 et, surtout, 10% qui font la différence.
Pour faire une analogie, disons que le traducteur est encore le seul à pouvoir suivre en temps réel la dynamicité des langues et résoudre les problématiques délicates du dernier kilomètre...
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Ici j'ai profité d'une pause dans la conversation pour demander à Hammouda Salhi des renseignements sur le marché de la langue arabe. Sa réponse en trois points :
- les nombreux traducteurs débutants ont une influence majeure sur les prix avec le risque de casser le marché ;
- la TA est aussi malheureusement très présente pour la langue arabe ;
- la quadrature du triangle est universelle...
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Question 5 : comment débute-t-on, et comment construit-on la poursuite de sa carrière ?
Ici j'en reviens un peu à ce que j'ai dit depuis le début : il est fondamental d'apprendre à se connaître, professionnellement parlant, et à se mesurer avec les autres, ce qui exige un travail continu sur soi-même, sur ses capacités et sa connaissance des langues sources, des secteurs, sur sa maîtrise de sa propre langue, sur l'exigence de se former et s'améliorer en continu, etc.
Le test de traduction est un bon exemple : lorsque je passe un test de traduction, formellement mon CV et mes 35 ans d'expérience ne me sont pas plus utiles que le diplôme du traducteur frais émoulu de son école/université qui passe le même test que moi.
Nous sommes à égalité sur la ligne de départ, que ce soit un test ou une mission de traduction, et c'est le jeu du marché. Toute carrière se base sur ces même éléments.
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Question 6 : dans le cadre de l'autoformation, commence-t-on en explorant de nouveaux univers ou en partant sur ses propres centres d'intérêts ?
Lorsqu'on travaille sur ses centres d'intérêts, on se forme et on s'améliore plus volontiers. Cependant nos centres d'intérêts doivent aussi correspondre aux exigences du marché : s'ils ne correspondent en rien, ou seulement de façon partielle, alors il convient d'identifier des secteurs porteurs et de se former à ces secteurs.
Cela demande la capacité de s'adapter à une nouvelle spécialité (ou plusieurs), de mener des études de marché, d'identifier des sociétés auxquelles fournir nos services et les contacts au sein de ces sociétés, sans oublier l'importance de cultiver notre réseau, de l'élargir le plus possible, d'apprendre à dialoguer et à rechercher des compromis (au sens positif : je fais un bout de chemin, mon interlocuteur aussi, et nous trouvons un juste milieu ensemble), etc.
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Question 7 : quelle(s) différence(s) entre localisation et traduction ?
La localisation (L10N) correspond à la modification finale des produits/services pour prendre en compte les spécificités inhérentes aux marchés cibles ; touche tous les aspects de la commercialisation : conditionnement, documentation, promotion, etc. La localisation s'oppose à la standardisation, où seul change le message, forcément traduit/adapté.
La traduction n'est qu'une brique de l'ensemble "localisation", dont la plateforme peut concerner un site Web ou un logiciel déclinés en plusieurs langues, sans oublier l'importance du shipping, à savoir la commercialisation simultanée d'un site/logiciel, par exemple, dans tous les pays auxquels il est destiné.
Pour simplifier la traduction véhicule le caractère linguistique d'un message, la localisation les aspects culturels qui sont derrière.
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Question 8 : qu'en est-il du gaming ?
Le gaming est un exemple parfait de localisation (cf. question précédente). Personnellement je ne connais rien à ce secteur, mais puisque de nombreux jeux sont localisés en langue arabe, si vous vous sentez capable de le faire mon conseil est de monter un dossier (étude sectorielle, des concurrents, des différents jeux) et de vous présenter non pas comme un débutant, mais comme un spécialiste.
C'est l'exemple typique d'une passion qui recouvre une exigence du marché dans un domaine porteur (cf. question 6)...
Merci !
Pour conclure, je renvoie celles et ceux qui le souhaiteraient à mes "Conseils aux jeunes qui réfléchissent à leur carrière future", conseils ne concernant d'ailleurs pas que les traducteurs/interprètes, mais plus largement tous les jeunes sur le point d'entreprendre une carrière quelconque et se demandant souvent par où commencer...
It has been one of the most insightful lectures so far, the way you were so direct and focused on the technical aspects of our job, we cannot thank you enough Mr Jean Marie, and we wish to see you again, there is always something to learn from you !
RépondreSupprimerI cannot thank you enough, it has been a real honor to interact with a successful business leader !
thank you, stay safe !
thank you again haha
best regards.
Thank you so much, your comment touches me deeply!
SupprimerThank you Jean Marie for sharing a summary of this insightful lecture!
RépondreSupprimer- Amel Tayechi -