Première ébauche de réponse à la question : « Qui est Federico Pucci ? »
* * *
Septième partie - Federico Pucci, linguiste émérite, inventeur et précurseur de la traduction automatique
Sixième partie - Le traducteur [électro]-mécanique selon Federico Pucci
Cinquième partie - Exclusivité : Federico Pucci, inventeur du premier "traducteur mécanique" des temps modernes
Quatrième partie - Premier texte au monde sur la traduction automatique
Troisième partie (en italien) - Federico Pucci, pioniere della traduzione automaticaDeuxième partie - Federico Pucci : LE précurseur de la traduction automatique
Première partie - Traduction automatique : SCOOP sur le traducteur dynamo-mécanique !
Sur Adscriptor :
Federico Pucci, inventeur du premier "traducteur mécanique" des temps modernes
4. Il traduttore [elettro]-meccanico secondo Federico Pucci (17/06/2017)
3. Exclusivité : les inventions de Federico Pucci dans la traduction automatique (24/03/2017)
2. Histoire actualisée de la traduction automatique (17/03/2017)
1. Traduction automatique : une découverte extraordinaire (16/03/2017)
Effectivement, pour reprendre M. Hutchins, jusqu’à présent, personne « ne savait rien d’autre sur M. Pucci ».
Monsieur Federico Pucci est né à Naples le 23 mars 1896 et mort à Salerne le 6 mars 1973, âgé de 77 ans.
Je dois nombre des informations publiées ici à sa petite-fille et à sa fille, que j’ai eu l’occasion de rencontrer à Salerne dans l’après-midi du 26 juillet 2017, et qui m’a parlé de son père, homme mystérieux y compris pour sa famille.
C’était un prodige des langues reconnu, puisque nous disposons d’une déclaration du Vice-Questeur de Salerne, G. Cenami, datée du 15 septembre 1948, qui précise en sa qualité de « Président de la Commission Provinciale censure de guerre » à l’époque :
Cependant, il faut bien comprendre que l’année 1943 marque un tounant décisif pour l’Italie, et notamment pour la zone de Salerne, où a lieu le débarquement allié (Opération Avalanche), qui passe en quelques mois de la domination allemande à la domination américaine.
À cette époque, M. Pucci avait quitté Salerne pour s’établir à Aiello di Baronissi, où sa famille alla le rejoindre ensuite, à pied… Village de montagne distant d’une quinzaine de km, la 16e Panzerdivision blindée de la Wehrmacht s’y trouvait à l’époque.
Or d’après sa fille, les allemands tenaient M. Pucci en grande considération, ce qui fait naître plusieurs interrogations, sans réponses à ce jour.
Entre autres, il y a un passage intrigant dans la lettre que M. Pucci adresse le 10 juillet 1949 au Conseil National des Recherches italien, où il relate l’épisode suivant :
Quel simple civil aurait-il donc pu examiner de près l’Enigma, machine ultra-secrète à l’époque ?
Un autre fait troublant, selon moi, est à mettre en relation avec les services secrets et un général italien, autre polyglotte d’exception (il parlait 25 langues et plusieurs dialectes) : Vittorio Gamba, qui dirigeait la section cryptographique du Service d’Informations Militaire (SIM), plutôt pauvre en ressources (le général Gamba se plaignait souvent de la difficulté de repérer des agents particulièrement compétents) mais riche en réussites…
Or selon le livre « Conoscere il nemico. Apparati di intelligence e modelli culturali nella storia contemporanea », publié en 2010 par l’éditeur Franco Angeli, le SIM a été complètement réorganisé à partir du 1er juillet 1943, peu avant l’armistice italien :
Du reste, dans un document plutôt approfondi sur le général, le journaliste nous apprend que Vittorio Gamba avait eu auparavant l’occasion de travailler sur une machine électronique, une sorte d’enregistreur non seulement en mesure de conserver les mots et les sons, mais également de les restituer graphiquement ([Gamba] … aveva pure lavorato a una macchina elettronica, una specie di registratore in grado non solo di ritenere le parole e i suoni ma anche di renderli graficamente.)
Une description qui se rapproche étrangement de celle que fait M. Pucci des diverses déclinaisons de sa machine, dont il explique le concept général :
Et de même que le mystère entoure les activités de M. Pucci avant l’armistice et sous la domination allemande, il enveloppe également ses activités après l’armistice et sous la domination américaine. La première chose qui m’a frappé dans cette histoire étant justement que l’info est d’abord sortie aux États-Unis, par une dépêche de l’United Press…
Last but not least, le mystère suprême tient dans la question suivante : indépendamment des appellations qu’il lui donne au fil du temps, la « machine à traduire » de Federico Pucci a-t-elle jamais existé « physiquement », ou bien n’a-t-elle jamais dépassé l’état de maquette ?
Pucci lui-même nous donne une indication de son « inexistence » lorsqu’il décrit sa participation à la Foire de Leipzig :
Le projet serait donc resté sur le papier, comme semble le confirmer la première réponse du CNR (20/07/1949) au courrier de M. Pucci (10/07/1949) :
Idem pour la médaille d’argent accordée en 1950 par la Foire Internationale Mosane de Liège, qui récompense la « Traduction écrite et parlante des langues sans les connaître », et non pas un « Interprète Électro-mécanique Portable » tel que le dénomme M. Pucci lui-même.
Cela dit, comme déjà vu, en 1950 le livre seul était vendu 150 lires, et 600 lires avec la machine !
Le fait que la machine ne coûtait que 450 lires et pouvait être vendue avec le livre indique l'orientation "démocratique et universelle" de M. Pucci, qui voulait faire de son invention une chose pratique, peu encombrante et abordable pour tous, une approche radicalement différente de tous les autres travaux connus à ce moment-là (et même par la suite).
Donc existe-t-il un exemplaire de cette machine quelque part ? Mystère ! En tout cas sa fille n'en a aucun souvenir précis.
Et d'autres que lui l'ont-ils jamais réalisée, comme semble le laisser entendre cet extrait (10 juillet 1949) :
Pour autant, M. Pucci a décrit son « invention », présentée dès le mois de décembre 1929, dans une dizaine de livres dédiés (ceux dont j’ai connaissance, ce qui n’exclut pas qu’il ait pu en écrire d’autres, encore à trouver…), publiés pendant près de 30 ans, dont voici la dernière chronologie actualisée :
Un exemplaire de ce dernier, qui ne se trouvait dans aucune des bibliothèques consultées jusqu’à présent (notamment Salerne et Florence), m’a très gentiment été fourni par la fille de M. Federico Pucci, qui m'a également fait voir de nombreuses grammaires annotées de la main de son père, dans les langues les plus diverses : de l'albanais au catalan, de l'arménien au somalien en passant par l'hébreu...
Autrement dit, ce dernier a consacré une grande partie de son existence à tenter de faire vivre son invention par tous les moyens, dans un engagement sans faille mais ignoré de tous, n’ayant eu comme contrepartie que sa solitude.
Une situation qu’il décrit fort bien dans son long courrier adressé en juillet 1949 au Conseil National des Recherches italien, qui avait essentiellement pour but de revendiquer avec force et précision l'antériorité de son invention sur les américains (selon sa fille, il écrivit même à Clare Boothe Luce, Ambassadrice des États-Unis en poste à Rome entre 1953 et 1956), et qui dénote parfaitement la clairvoyance de son analyse, lorsqu’il indique que la puissance des « mathématiques et leurs lois inflexibles et immobiles ne se prêtent pas à emprisonner les obstacles en mouvement que présentent inéluctablement des masses extrêmement fluides comme les langues ».
Une vérité que russes, américains et français expérimenteront pendant un demi-siècle (en gros depuis la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu’à l’implication de Google dans la traduction automatique), sans que les centaines de millions de roubles, de dollars ou de francs dépensés n’aboutissent à rien de vraiment satisfaisant.
Personnellement, je continuerai mes recherches sur M. Federico Pucci, linguiste émérite, inventeur et précurseur de la traduction automatique, dans le cadre de mes possibilités, en vous tenant informés au fur et à mesure que je trouverai du nouveau, ce dont je ne désespère pas.
Mais j’espère surtout que tôt ou tard, des institutions, des chercheurs ou des universités s’intéresseront à lui et approfondiront ses formidables intuitions, lui qui a imaginé il y a près de 90 ans et dans l'isolement le plus total l'utopie – aujourd’hui en grande partie réalisée – de permettre aux gens de traduire les langues, de façon immédiate, sans les connaître et pratiquement sans aucun vocabulaire !!!
Toutes proportions gardées, Federico Pucci me fait penser à Charles Goodyear...
À tout moment, je tiens la documentation en ma possession à l'entière disposition de qui aurait un intérêt quelconque à développer le fonctionnement des "machines" de M. Pucci.
À suivre…
3. Exclusivité : les inventions de Federico Pucci dans la traduction automatique (24/03/2017)
2. Histoire actualisée de la traduction automatique (17/03/2017)
1. Traduction automatique : une découverte extraordinaire (16/03/2017)
* * *
À ce jour, j’ai publié 10 billets sur la découverte extraordinaire de M. Federico Pucci et sur la naissance de ce scoop. Celui-ci est le onzième, et sûrement pas le dernier...
M. Pucci est le précurseur absolu de la traduction automatique moderne, puisque ses premières publications sur le « traducteur mécanique » précèdent les « machines à traduire » et les travaux de MM. Georges Artsrouni et Petr Petrovič Smirnov-Trojanskij (respectivement à partir de 1932 et 1933), qui sont généralement considérés les pionners dans ce domaine.
Or en décembre 1929, Federico Pucci présente pour la première fois à Salerne son étude sur le "traducteur mécanique", dévoilé à la presse en janvier 1930, avant de faire concourir à l'Exposition Nationale de Bolzano (toujours en 1930), section littéraire, son dispositif de « traducteur mécanique » primé par une médaille d'argent.
En 1931, Federico Pucci publie à Salerne la partie I de ce qui est vraisemblablement le premier ouvrage jamais publié sur un dispositif de "traduction mécanique" : « Le traducteur mécanique et la méthode pour correspondre entre européens, chacun en connaissant uniquement sa propre langue ».
C’est donc à juste titre que M. Federico Pucci peut être considéré comme l’inventeur du premier "traducteur mécanique" des temps modernes, quand bien même à ce jour nul n’a jamais entendu parler ni de lui ni de son invention, si ce n’est par un entrefilet, reprenant très problablement une dépêche de l’United Press de l’époque (fin août 1949), publié aux États-Unis sur plusieurs quotidiens, dont le New York Times, comme nous le relate par deux fois M. John Hutchins, en 1997 et 2005 :
On 26 August 1949, the New York Times reported (page 9) from Salerno:
Federico Pucci announced today that he had invented a machine that could translate copy from any language into any other language. He said that the machine was electrically operated, but refused to disclose details. He said that he would enter it in the Paris International Fair of Inventions next month.
It is uncertain whether Pucci had any knowledge of Huskey’s proposals, and it seems most unlikely he knew about Weaver's memorandum or the British experiments. In any event, there is no trace of any demonstration at the Paris fair; and nothing more is known about Pucci.
* * *
Effectivement, pour reprendre M. Hutchins, jusqu’à présent, personne « ne savait rien d’autre sur M. Pucci ».
Monsieur Federico Pucci est né à Naples le 23 mars 1896 et mort à Salerne le 6 mars 1973, âgé de 77 ans.
Je dois nombre des informations publiées ici à sa petite-fille et à sa fille, que j’ai eu l’occasion de rencontrer à Salerne dans l’après-midi du 26 juillet 2017, et qui m’a parlé de son père, homme mystérieux y compris pour sa famille.
C’était un prodige des langues reconnu, puisque nous disposons d’une déclaration du Vice-Questeur de Salerne, G. Cenami, datée du 15 septembre 1948, qui précise en sa qualité de « Président de la Commission Provinciale censure de guerre » à l’époque :
… il Rag. Pucci, durante l'ultimo conflitto mondiale, e precisamente dal luglio 1940 al luglio 1943, espletò (…) le mansioni di traduttore-Censore della corrispondenza estera presso la Commissione Provinciale censura di guerra di Salerno.
Al Pucci, che è un noto ed esperto poliglotta, veniva affidata la traduzione e censura non soltanto delle corrispondenze civili redatte in circa trente lingue estere in arrivo a Salerno, ma quelle che affluivano da numerose altre Commissioni Provinciale fornite di traduttori, come da disposizione ministeriale. Il Pucci espletò tali mansioni molto lodevolmente e con rara perspicacia.Un polyglotte, expert notoire … dans une trentaine de langues :
M. Pucci, durant la Seconde Guerre mondiale, à savoir entre juillet 1940 et juillet 1943, a exercé (…) la fonction de traducteur-censeur de la correspondance étrangère qui parvenait à la Commission provinciale censure de guerre de Salerne.
M. Pucci, qui est connu comme étant un polyglotte expérimenté, s’est vu confier la traduction et la censure non seulement de la correspondance civile rédigée dans une trentaine de langues étrangères qui arrivait à Salerne, mais qui provenait également de plusieurs autres Commissions provinciales pouvant déjà compter sur la collaboration de traducteurs, conformément aux dispositions ministérielles. M. Pucci a accompli les tâches qui lui étaient confiées avec diligence et une rare perspicacité.Selon un autre document, M. Pucci aurait consacré à ses fonctions, en plus de son horaire habituel, 106 heures supplémentaires mensuelles, et aurait vu son salaire passer de 400 à 1000 lires, soit une augmentation de 150 %…
Cependant, il faut bien comprendre que l’année 1943 marque un tounant décisif pour l’Italie, et notamment pour la zone de Salerne, où a lieu le débarquement allié (Opération Avalanche), qui passe en quelques mois de la domination allemande à la domination américaine.
À cette époque, M. Pucci avait quitté Salerne pour s’établir à Aiello di Baronissi, où sa famille alla le rejoindre ensuite, à pied… Village de montagne distant d’une quinzaine de km, la 16e Panzerdivision blindée de la Wehrmacht s’y trouvait à l’époque.
Or d’après sa fille, les allemands tenaient M. Pucci en grande considération, ce qui fait naître plusieurs interrogations, sans réponses à ce jour.
Entre autres, il y a un passage intrigant dans la lettre que M. Pucci adresse le 10 juillet 1949 au Conseil National des Recherches italien, où il relate l’épisode suivant :
Lors de la retraite allemande de Salerne, j'eus l'occasion d'examiner de près une machine militaire allemande dénommée « Enigma », dont le nom était écrit sur l'appareil ; celle-ci présentait les mêmes principes que ceux sur lesquels reposait le Traducteur chiffré C-D ; toutefois, non seulement ces dispositifs avaient été perfectionnés, mais le problème que j’avais résolu au plan mécanique était maintenant transposé au plan électrique. En raison des événements, guerre oblige, je ne pus examiner l'appareil allemand que pendant quelques minutes ; toutefois je pourrais en faire une description sommaire et le mettre en relation avec mes traducteurs mécaniques C et D.« Lors de la retraite allemande de Salerne, j'eus l'occasion d'examiner de près une machine militaire allemande dénommée « Enigma », dont le nom était écrit sur l'appareil… ».
Quel simple civil aurait-il donc pu examiner de près l’Enigma, machine ultra-secrète à l’époque ?
Un autre fait troublant, selon moi, est à mettre en relation avec les services secrets et un général italien, autre polyglotte d’exception (il parlait 25 langues et plusieurs dialectes) : Vittorio Gamba, qui dirigeait la section cryptographique du Service d’Informations Militaire (SIM), plutôt pauvre en ressources (le général Gamba se plaignait souvent de la difficulté de repérer des agents particulièrement compétents) mais riche en réussites…
Or selon le livre « Conoscere il nemico. Apparati di intelligence e modelli culturali nella storia contemporanea », publié en 2010 par l’éditeur Franco Angeli, le SIM a été complètement réorganisé à partir du 1er juillet 1943, peu avant l’armistice italien :
Il 1° luglio 1943, poco prima dell’armistizio, il SIM fu completamente riorganizzato in dieci organi direttivi, tra cui la 2a sezione ‘Bonsignore’ con compiti defensivi…, la 3e sezione, coordinamento censura di guerra, che comprendeva altri cinque gruppi, tra cui il Gruppo controllo stampa estera, e la 4e sezione crittografica, che comprendeva anche altri sei gruppi…Par conséquent il me semble improbable que le chef de la 4e section cryptographique pût ignorer l’existence d’un polyglotte encore plus exceptionnel que lui, qui travaillait assurément sous le contrôle de la 3e section (coordination de la censure de guerre, ... dont le Groupe sur le contrôle de la presse étrangère)...
Du reste, dans un document plutôt approfondi sur le général, le journaliste nous apprend que Vittorio Gamba avait eu auparavant l’occasion de travailler sur une machine électronique, une sorte d’enregistreur non seulement en mesure de conserver les mots et les sons, mais également de les restituer graphiquement ([Gamba] … aveva pure lavorato a una macchina elettronica, una specie di registratore in grado non solo di ritenere le parole e i suoni ma anche di renderli graficamente.)
Une description qui se rapproche étrangement de celle que fait M. Pucci des diverses déclinaisons de sa machine, dont il explique le concept général :
Pour une machine électrique, le mouvement qui est fait à la main dans le cas présent est effectué par l'électricité ; pour la machine phono-électrique, le vocabulaire mobile comporte trois colonnes, dont les deux premières sont imprimées sur une feuille d'étain, et la troisième est constituée par un disque d'acier tel que celui d'un phonographe, sur lequel le locuteur étranger enregistre la prononciation des termes de sa langue ; près de chaque mot italien se trouve un numéro ; en appuyant sur un bouton, une tête de lecture électrifiée dans un champ magnétique se déplace sur la prononciation enregistrée et lit le mot en langue étrangère, après qu'un mouvement électrique ait procédé aux corrections graphique et phonétique : dans ce cas, en remplaçant « o » par « oes » ; le système télé-électrique suppose deux traducteurs électriques, l'un fonctionnant comme dispositif de transmission, disons à Rome, et l'autre comme dispositif de réception, disons à Londres ; en reliant les deux unités avec un téléimprimeur, le dispositif qui se trouve à Londres effectue les mêmes mouvements que le dispositif de transmission à Rome, pour obtenir à distance la traduction écrite et orale ; dans les autres types de machine, la partie du correcteur syntaxique est encadrée dans le vocabulaire mobile ; j'ai retenu cette disposition pour simplifier le vocabulaire en vue des expériences à réaliser ; j'ai choisi l'anglais pour une première application, car les variations morphologiques de cette langue sont peu nombreuses ; pour les expérimentations phoniques nous préférerons l'espagnol, et les premières expériences photo-télé-électriques seront tentées entre Rome (peut-être auprès de l'Académie universelle des inventeurs et des auteurs) et les bureaux des organisations alliées de l'Association Pro-Pace pour la langue espagnole. Avant de traduire, on consulte le correcteur syntaxique qui donne la construction.Écrit en 1950, comme il signale lui-même à propos, non plus de "sa" machine, mais de "ses" machines et de leur utilisation :
(...)Pour les machines où le vocabulaire mobile est complet, une fois tirée la première lettre, la machine sort le feuillet comprenant tous les mots qui commencent par cette lettre, puis on tire la deuxième lettre, qui met en évidence la troisième selon un système similaire, et ainsi de suite.
En remplaçant le mouvement manuel par un clavier actionné électriquement, il est possible de taper le mot à la machine et de déterminer le terme étranger à extraire.
Ces machines se déclinent en machines simples, mécaniques, électriques, phono-électriques, photo-électriques et télé-électriques, et donnent naissance à de nombreux autres types composés, dont l'Interprète Électro-mécanique Portable, qui a été primé au Grand Concours d'Inventions de Liège.
Last but not least, le mystère suprême tient dans la question suivante : indépendamment des appellations qu’il lui donne au fil du temps, la « machine à traduire » de Federico Pucci a-t-elle jamais existé « physiquement », ou bien n’a-t-elle jamais dépassé l’état de maquette ?
Pucci lui-même nous donne une indication de son « inexistence » lorsqu’il décrit sa participation à la Foire de Leipzig :
En poursuivant mon exposé, je dois dire qu’il me fut également permis, en 1936, de participer à l'exposition de Leipzig, même si l’Exposition internationale des inventions qui se déroula dans cette ville, tout en appréciant mes études et en reconnaissant leur caractère innovant, ne l’accepta pas, l'originalité de mon invention étant qu’elle fut la seule à ne figurer que dans des livres, auquel cas le droit allemand ne prévoit pas la brevetabilité, chose que prévoit au contraire la loi française, au point qu’un brevet provisoire me fut délivré dans ce pays…Pour être complet, je n’ai trouvé aucune trace de ce « brevet provisoire ».
Le projet serait donc resté sur le papier, comme semble le confirmer la première réponse du CNR (20/07/1949) au courrier de M. Pucci (10/07/1949) :
Faisant suite à votre courrier du 10 juillet courant, nous signalons que votre projet de conception d’un « traducteur électromécanique italien » peut être soumis à l’examen de l'Institut national pour l'examen des inventions, qui dépendait auparavant du présent Conseil et dépend maintenant du Ministère de l'Industrie et du Commerce (Rome, Via S. Basilio 8).
Vous pouvez donc contacter directement ledit Institut en présentant des projets bien définis au plan technique et convenablement illustrés, à même de permettre la formulation d'un avis sur le fond qui, s’il est favorable, pourra déboucher sur une aide adaptée au développement de l’invention.Du reste, la médaille d’argent accordée en mai 1935 par la Foire de Paris récompense « une méthode à traduire les langues sans les connaître », et non pas « une machine à traduire les langues sans les connaître ». Les mots ont plus que jamais leur importance…
Idem pour la médaille d’argent accordée en 1950 par la Foire Internationale Mosane de Liège, qui récompense la « Traduction écrite et parlante des langues sans les connaître », et non pas un « Interprète Électro-mécanique Portable » tel que le dénomme M. Pucci lui-même.
Cela dit, comme déjà vu, en 1950 le livre seul était vendu 150 lires, et 600 lires avec la machine !
Le fait que la machine ne coûtait que 450 lires et pouvait être vendue avec le livre indique l'orientation "démocratique et universelle" de M. Pucci, qui voulait faire de son invention une chose pratique, peu encombrante et abordable pour tous, une approche radicalement différente de tous les autres travaux connus à ce moment-là (et même par la suite).
Donc existe-t-il un exemplaire de cette machine quelque part ? Mystère ! En tout cas sa fille n'en a aucun souvenir précis.
Et d'autres que lui l'ont-ils jamais réalisée, comme semble le laisser entendre cet extrait (10 juillet 1949) :
Puis ce fut la guerre, et le soussigné tenta de transposer ses études sur un plan militaire, en parvenant à créer les traducteurs mécaniques de type C et D, c’est-à-dire en reportant le problème sur un plan mécanique et en essayant de créer une nouvelle langue de formation mécanique, le dispositif C fonctionnant comme émetteur, et le dispositif D comme récepteur, ces deux dispositifs devant participer à l'Exposition de la Technique en 1940 ; pour autant, la Ministère de la Guerre s’opposa à cette participation, et je fus appelé à Rome pour apporter des éclaircissements sur mon invention, qui fut reconnue correcte et pour laquelle on m’autorisa à construire l'appareil aux frais de l'état pour les premières expériences, vu que je n'avais pas les capacités financières pour le faire. Naturellement, je fus obligé de garder le silence. Toutefois, en sachant que je n’avais pas les compétences mécaniques pour construire l'appareil et qu’il m’aurait fallu faire appel à des tiers, qui n’auraient pas forcément gardé le secret, j’ai préféré refuser la mission pour ne pas courir de risque, en abandonnant l'invention aux mains du Ministère de la Guerre afin qu'il en fit ce qu’il aurait jugé bon.
Il serait inutile de mentionner ces traducteurs mécaniques de type C et D s’ils n’avaient pas de rapport avec le problème de la traduction électrique, sur laquelle se penchent maintenant les américains, et à laquelle je n'aurais jamais pensé si je n’avais pas été amené à vivre les circonstances indiquées ici.
* * *
Pour autant, M. Pucci a décrit son « invention », présentée dès le mois de décembre 1929, dans une dizaine de livres dédiés (ceux dont j’ai connaissance, ce qui n’exclut pas qu’il ait pu en écrire d’autres, encore à trouver…), publiés pendant près de 30 ans, dont voici la dernière chronologie actualisée :
- 1931 : Il traduttore meccanico ed il metodo per corrispondersi fra Europei conoscendo ciascuno solo la propria lingua : Parte I (Traduzioni dalla lingua estera).
Traduction : « Le traducteur mécanique et la méthode pour correspondre entre européens, chacun en connaissant uniquement sa propre langue », 1e partie (Traductions à partir de la langue étrangère). Publié durant la neuvième année de l'ère fasciste !
C'est l'ouvrage le plus complet, 68 pages de descriptions, dans lequel il nous dit que son étude fut présentée pour la première fois en décembre 1929.
- 1949 : Serie delle grammatiche dinamiche, pratiche, ragionate, storico-comparate : Parte I. Per coloro che in pochi giorni desiderano acquistare una conoscenza elementare della lingua straniera. [fasc. ] I. Inglese
- 1949 : Le traducteur dynamo-mecanique : L'invention pour traduire les langues de l'occident sans les connaitre presque sans dictionnaire. Op. I: anglais-francais
Le sous-titre dit ceci : « Perfectionnement de l'invention primée (traduction mécanique) avec diplôme de médaille d'argent à l'Exposition Concours International des Inventions, Foire de Paris 1935 ».
- 1949 : Il traduttore dinamo-meccanico : Serie A. L'invenzione per la traduzione immediata e rapida nelle lingue dell'Occidente senza conoscerle e quasi senza vocabolario... [fasc. ] 1. francese - italiano
- 1949 : Il traduttore dinamo-meccanico : Serie A. L'invenzione per la traduzione immediata e rapida nelle lingue dell'Occidente senza conoscerle e quasi senza vocabolario... [fasc. ] 2. Inglese - italiano
- 1950 : Grammatica dinamica della Lingua tedesca : (linee fondamentali)
- 1950 : Il traduttore dinamo-meccanico : Tipo libro macchina. Serie a. L'invenzione per la traduzione immediata e rapida nelle lingue dell'Occidente senza conoscerle e quasi senza vocabolario. [fasc. ] 1. Italiano-Inglese
- 1952 : Il traduttore dinamo-meccanico : Serie B. L'invenzione per la traduzione immediata e rapida nelle lingue dell'Occidente senza conoscerle e quasi senza vocabolario... [fasc. ] 1. Italiano - Francese
- 1958 : Vocabolario mobile italiano - francese : (parte Traduttore Meccanico)
Traduction : « Vocabulaire mobile italien – français : (partie Traducteur mécanique) ».
- 1960 : Il traduttore dinamo-meccanico : Serie A. L'invenzione per la traduzione immediata e rapida nelle lingue dell'Occidente senza conoscerle e quasi senza vocabolario... Tedesco - Italiano
Un exemplaire de ce dernier, qui ne se trouvait dans aucune des bibliothèques consultées jusqu’à présent (notamment Salerne et Florence), m’a très gentiment été fourni par la fille de M. Federico Pucci, qui m'a également fait voir de nombreuses grammaires annotées de la main de son père, dans les langues les plus diverses : de l'albanais au catalan, de l'arménien au somalien en passant par l'hébreu...
Autrement dit, ce dernier a consacré une grande partie de son existence à tenter de faire vivre son invention par tous les moyens, dans un engagement sans faille mais ignoré de tous, n’ayant eu comme contrepartie que sa solitude.
Une situation qu’il décrit fort bien dans son long courrier adressé en juillet 1949 au Conseil National des Recherches italien, qui avait essentiellement pour but de revendiquer avec force et précision l'antériorité de son invention sur les américains (selon sa fille, il écrivit même à Clare Boothe Luce, Ambassadrice des États-Unis en poste à Rome entre 1953 et 1956), et qui dénote parfaitement la clairvoyance de son analyse, lorsqu’il indique que la puissance des « mathématiques et leurs lois inflexibles et immobiles ne se prêtent pas à emprisonner les obstacles en mouvement que présentent inéluctablement des masses extrêmement fluides comme les langues ».
Une vérité que russes, américains et français expérimenteront pendant un demi-siècle (en gros depuis la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu’à l’implication de Google dans la traduction automatique), sans que les centaines de millions de roubles, de dollars ou de francs dépensés n’aboutissent à rien de vraiment satisfaisant.
Personnellement, je continuerai mes recherches sur M. Federico Pucci, linguiste émérite, inventeur et précurseur de la traduction automatique, dans le cadre de mes possibilités, en vous tenant informés au fur et à mesure que je trouverai du nouveau, ce dont je ne désespère pas.
Mais j’espère surtout que tôt ou tard, des institutions, des chercheurs ou des universités s’intéresseront à lui et approfondiront ses formidables intuitions, lui qui a imaginé il y a près de 90 ans et dans l'isolement le plus total l'utopie – aujourd’hui en grande partie réalisée – de permettre aux gens de traduire les langues, de façon immédiate, sans les connaître et pratiquement sans aucun vocabulaire !!!
Toutes proportions gardées, Federico Pucci me fait penser à Charles Goodyear...
À tout moment, je tiens la documentation en ma possession à l'entière disposition de qui aurait un intérêt quelconque à développer le fonctionnement des "machines" de M. Pucci.
À suivre…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire